Après tout, la meilleure manière de voyager est de sentir, tout sentir de toutes les manières […] Plus divers dans l’unité, attentif dans la dispersion, je sentirai, je vivrai, je serai dans l’instant et dans mon essence. Fernando Pessoa, Visage avec masques
La Gestalt-thérapie est une psychothérapie, ce qui signifie que comme toute psychothérapie, elle est indiquée dès lors qu’il y a mal-être et a pour objectif d’explorer, de comprendre et de transformer ce qui le constitue : blocages, peurs, évitements, attentes, empêchements … etc. C’est un processus de transformation vers plus de vitalité et de mieux être psychique.
Elle fait partie des thérapies dites brèves qui peuvent aller de 8-9 mois à 3-4 ans. La durée dans le temps varie en fonction de la personne et de ce qu’elle amène en thérapie.
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Depuis une vingtaine d’années, la Gestalt-thérapie est devenue l’une des psychothérapies les plus répandues à travers le monde avec la psychanalyse et les thérapies cognitivo-comportementales. Elle se situe à la croisée de la psychanalyse, des thérapies psychocorporelles (Wilhelm Reich), des pensées existentialistes et des philosophies orientales.
Le terme vient du mot allemand Gestalten qui signifie « mettre en forme, donner une structure », au sens élargi : une signification. Cette psychothérapie a été créée au début des années 50 par Fritz Perls, psychiatre et psychanalyste allemand – et ses collaborateurs Laura Perls et le new yorkais Paul Goodman – qui se sont appuyés sur les travaux de la Gestalt-psychologie et de la pensée existentialiste pour créer une méthodologie psychothérapeutique qualifiée aujourd’hui d’humaniste.
De la même façon qu’il n’existe pas une psychanalyse, il n’existe pas une Gestalt-thérapie mais des Gestalt-thérapies. Plusieurs branches se sont déployées depuis son émergence : certaines s’inspirent davantage de la psychanalyse, d’autres sont plus axées sur le corporel, la dynamique ou la créativité et d’autres encore puisent dans la phénoménologie. La Gestalt-thérapie que je pratique se réfère davantage à la phénoménologie existentielle et aux concepts d’origine qui portent une attention particulière à l’expérience immédiate et à la dynamique du processus à l’oeuvre pour la personne en thérapie. Une corporéité où le langage a toute sa place.
La Gestalt-thérapie étant une thérapie dynamique, la présentation qui suit n’a rien d’exhaustif. Elle esquisse quelques points du travail de Gestalt-thérapie tel que je le propose pour faire apparaître une silhouette qui permettra à ceux qui ne connaissent pas la Gestalt de discerner si cette approche leur conviendrait ou non.
La Gestalt n’est pas une psychologie appliquée. Elle ne propose pas d’interprétations et ne se réfère pas non plus à des grilles de lectures qui modélisent ce qui est adéquat ou non pour la personne. Sa posture est herméneutique, c’est-à-dire qu’elle se réfère à la notion de polysémie. Dit plus simplement, une même chose sera toujours investie d’une multiplicité de sens et d’interprétations. Ainsi lorsque nous regardons une table, nous sommes tous d’accord pour dire que c’est une table mais chacun va la voir d’une manière différente, en référence à sa propre histoire et à ses prismes. Lorsqu’il y a une odeur de brûlé, un pompier va penser qu’il y a le feu dans la maison, un cuisinier que quelque chose a brûlé dans la poêle et un électricien qu’il y a eu un court-circuit au disjoncteur. En postulant que chacun donne aux situations un sens qui lui est propre, la Gestalt-thérapie ne va pas proposer un sens a priori mais soutenir le processus qui va permettre à la personne de s’appuyer sur ses ressources pour comprendre ce qui se joue et le transformer vers un mieux être qui lui est propre. Plutôt que de chercher « pourquoi » la personne est en souffrance, on s’attache aussi à explorer « comment » faire différemment.
C’est pourquoi, plutôt que d’analyser ou interpréter des événements, des comportements ou des sentiments, elle va aider à identifier et reconnaître ce qui est là avec la personne en thérapie. Ce faisant, la méthodologie va consister à soutenir un processus de mise en sens qui va orienter et permettre la remise en mouvement de choix ajustés et accroître la vitalité de la personne.
L’axe de travail va être moins orienté vers la recherche des origines d’un problème que vers la prise de conscience de la façon dont il est (ré)organisé, ici et maintenant. Il va consister à s’intéresser au contact, ou plus précisément au « sujet-contactant » et à la qualité de ce contact. Ce qui va être au coeur du processus va être l’élargissement de la conscience immédiate de ce qui se produit ici et maintenant pour la personne en thérapie.
L’originalité de la Gestalt-thérapie réside à la fois dans la posture engagée du Gestalt-thérapeute qui va porter une attention particulière à ce processus et à la réhabilitation de la dimension corporelle au cours du travail thérapeutique. On sait aujourd’hui l’importance du non-verbal et la Gestalt-thérapie propose d’y porter un focus pour soutenir l’élaboration d’une signification et d’un besoin. Tout en explorant bien sûr les représentations, les fantasmes et l’histoire de la personne en thérapie, par moments, en se focalisant sur la qualité du contacter, le Gestalt-thérapeute va aider la personne à affiner et élargir la conscience de ce qui est vécu (sensations, perceptions, besoins …etc) et orienter une signification. A la recherche du « savoir pourquoi » la Gestalt-thérapie ajoute le « sentir comment et vers quoi », mobilisateur de changement. Ce faisant, elle explore aussi la tension qui s’opère entre désir et peur d’aller vers … La solution n’est donc ni proposée ni définie préalablement mais recherchée ensemble avec le thérapeute qui va ajuster ses propositions et soutenir le processus. Il s’agit toujours de tendre vers la possibilité d’un ajustement créateur pour la personne en thérapie.
